Juin2024
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La fraude corrompt-elle aussi la prescription dans le bail commercial ?

Cour de Cassation, civile, 3e chambre civile, 30 mai 2024, 23-10.184.

On sait que le bailleur qui délivre congé d’un bail commercial, sans offre de renouvellement doit, en principe, le paiement d’une indemnité d’éviction, le preneur pouvant se maintenir dans les lieux le temps du paiement de cette indemnité.

D’où la tentation, pour échapper au paiement de cette indemnité d’éviction, qui représente en général un montant important (puisqu’elle correspond soit au déplacement du fonds de commerce soit à son remplacement, et donc à la perte de ce fonds de commerce…), de vouloir enchaîner artificiellement des baux d’une durée courte, dite, dérogatoire.

Ce qui entraîne une deuxième conséquence issue de la prescription biennale des actions judiciaires issues du bail commercial (L145-60 du code de commerce) : toutes les actions de chacun des baux successifs se prescrivent par deux ans…

Sauf que dans un cas où les parties avaient enchainé plusieurs baux dérogatoires, au-delà de la durée prévue par l’article L 145-5 du code de commerce, manifestement à la demande du bailleur et pour éluder le paiement d’une indemnité d’éviction, la Cour de cassation relève la fraude.

Laquelle corrompt tout selon l’adage, y compris la prescription qui ne court pas.

On comprend ainsi qu’en cas de fraude, un bail peut être contesté au-delà du délai habituel de prescription de deux ans.