Projet de loi relatif au développement de l’offre de logements abordable
L’inscription du projet de loi au Sénat pour un examen en séance publique devait se dérouler à partir du 17 juin. Mais avec la dissolution de l’Assemblée nationale, l’ensemble des travaux parlementaires est suspendu avec effet immédiat.
Pourtant, l’Assemblée qui sera élue dans un mois pourrait décider de reprendre les travaux de cette loi car le sujet de l’insuffisance de logements reste un enjeu majeur, d’où l’importance de son analyse.
Chapitre premier : de nouveaux outils pour les élus bâtisseurs
Le chapitre premier permet aux maires d’intégrer le logement intermédiaire à leurs objectifs de construction issus de la loi SRU et d’accorder la première attribution de tout logement social dont ils ont décidé la construction. De même, leur droit de préemption est élargi.
L’article premier ouvre la possibilité d’éviter les pénalités de carence infligées aux communes ne respectant pas les minimas de logements sociaux (issus de la loi SRU). Pour ce faire, la loi maintient le quota de logements sociaux demandés pour chaque commune, mais admet désormais qu’un nombre allant jusqu’à un quart des objectifs de rattrapage triennal soit non plus des logements sociaux, mais des logements intermédiaires. Une telle mesure permettra de simplifier et d’élargir avec souplesse l’offre disponible sur le marché, en offrant des logements à un prix toujours intéressant.
En parallèle, l’article second accorde des pouvoirs spécifiques aux maires en termes d’attribution des logements sociaux. Cet article vise à renforcer la pertinence des premières attributions en se basant sur la présomption de proximité du maire qui connait ses administrés et son territoire. Cet article se concentre sur les premières attributions car elles sont souvent déterminantes dans la vie d’un locataire, ce dernier pouvant procéder à des nombreux changements (et donc créer un encombrement administratif et du délai) quand il n’est pas satisfait.
Quant à l’article troisième, il doit, face à l’envolée des prix du foncier, permettre de prolonger la durée de validité des zones d’aménagement différé (ZAD). Ces dernières permettent notamment aux collectivités territoriales de s’assurer du contrôle foncier des terrains via l’exercice d’un pouvoir de préemption. A cet effet est aussi crée un droit de préemption urbain (DPU) permettant de réguler des marchés fonciers et immobiliers avec des prix manifestement excessifs, et en rétrocédant au bout de cinq ans à des acteurs du logement abordable ces marchés préemptés.
Chapitre second : simplifier les procédures administratives pour construire plus vite
En premier lieu, l’article 4 de cette loi offre de réduire les délais des recours hiérarchiques et gracieux contre les permis de construire en posant des limites permettant d’aller plus vite dans les projets de construction : un mois pour un recours gracieux ou hiérarchique contre deux actuellement ; un mois pour la réponse de l’autorité contre deux actuellement.
Parallèlement, cette simplification administrative est permise par l’article 5 : afin de faciliter l’optimisation et la densification des zones pavillonnaires et d’activité économique (ZAE), un dispositif à deux niveaux est créé : les orientations d‘aménagement et de programmation (OAP) et les PLU. Deux dispositifs pour plus de souplesse dans les dossiers d’urbanisme. De même, l’article prévoit l’assouplissement des règles de majorité applicables à la modification des documents d’un lotissement.
Enfin l’article 6 permettra, toujours dans cette gageure de simplification, d’unifier autour d’un permis de construire, les différentes demandes de permis relevant d’un projet répondant aux mêmes objectifs et pourtant sur des parcelles non contiguës. Il doit permettre de composer avec le bâti existant, de maitriser l’artificialisation des sols, dans une logique d’optimisation et d’utilisation de l’espace.
Chapitre trois : renforcer les capacités de production des bailleurs
A cet effet, l’article 7 offre aux bailleurs sociaux de produire davantage de logements locatifs intermédiaires (LLI) en doublant le taux de LLI qu’ils sont autorisés à gérer dans leurs parcs de logements locatifs sociaux. Il passe ainsi de 10 à 20%. En outre, l’article prévoit de dégager des ressources en facilitant la revente de logements intermédiaires à des opérateurs dédiés, permettant ainsi aux bailleurs sociaux de réinvestir rapidement les fonds dans de nouveaux projets de construction ou de réhabilitation. De même, un organisme mère pourra plus facilement consentir des avances en compte courant à sa filiale de logements intermédiaires.
Cet objectif de renforcement des fonds propres des bailleurs se retrouve dans l’article 8. Il permet d’harmoniser les loyers de deux logements sociaux comparables, avec des occupants aux ressources similaires, mais dont l’un, du fait de son ancienneté et des conventions avec l’Etat, est plafonné à un prix nettement inférieur au logement social neuf. Cet article, en plus de devoir viser à plus d’égalité, doit permettre aux bailleurs de dégager de la trésorerie pour des nouveaux projets.
L’article 9 permet de renforcer les Sociétés Civiles de Construction Vente (SCCV) entre opérateurs privés et bailleurs sociaux, en facilitant et clarifiant certaines prises d’initiatives et procédures, comme par exemple la suppression de l’accord préalable du représentant de l’Etat dans le département, aujourd’hui requis lorsque les organismes d’habitations à loyer modéré (OHLM) souhaitant souscrire des parts ou des actions dans des sociétés de projet d’aménagement.
Parallèlement, les OHLM pourront vendre directement en VEFA, au sein d’un programme mixte, des logements à des acquéreurs à l’unité (donc à des particuliers), et non plus seulement en bloc. Enfin, l’article élève à 50% au lieu de 30% actuel, la part maximale de logements du programme pouvant être vendus à des personnes privées. De fait, l’article permet d’augmenter les ressources propres des OHLM, et de potentiellement augmenter la production de logements.
Chapitre quatre : faciliter l’accès au logement
L’article 10 permet d’améliorer l’accès au logement des salariés dans les zones tendues en confiant une partie des attributions des logement sociaux à Action Logement, qui pourra loger davantage de ménages fragiles salariés dans les zones où la demande d’emploi est forte.
Pour remplir cet objectif, l’article 11 vise aussi à renforcer la mobilité en résidentielle en réévaluant la situation des locataires régulièrement, pour s’assurer que les ménages dont les ressources sont manifestement suffisantes, libèrent leurs logements sociaux.
L’article 12 s’inscrit dans la même gageure : l’abaissement du seuil de déclenchement du supplément de foyer de solidarité (SLS) permet de faire payer plus aux ménages dont les ressources sont supérieures à celles requises à la vie en logement social (8% du parc locatif), alors que l’assujettissement au SLS suppose aujourd’hui de dépasser ce seuil d’au moins 20%.
En parallèle, l’article 13 définit un dispositif de filtrage plus fin, en inaugurant des baux mobilités dans le parc social d’une durée allant de 1 à 10 mois, et permettant aux travailleurs précaires (formation professionnelle, contrat d’apprentissage, stage) de bénéficier d’un logement social de courte durée, tout en facilitant la mobilité dans le parc locatif.
Enfin, l’article 14 ouvre la voie – hors convention d’utilité sociale et communes carencées – à la vente « au fil de l’eau » de logements sociaux aux locataires, sans autorisation du préfet, mais par autorisation de la commune ou la métropole. Afin de prévenir toute difficulté de gestion des copropriétés, la demande d’autorisation devra indiquer si elle donnera lieu à l’application différée du statut de la copropriété en application des articles L. 443-15-5-1 à L. 443-15-5-8 du CCH.