Le logement du gardien
L’attribution d’un logement de fonction au gardien d’immeubles de catégorie B est désormais obligatoire en vertu de la jurisprudence récente de la Cour de cassation de même qu’en application d’un avenant à la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles.
Cela entraîne des conséquences sur les obligations découlant du contrat de travail et rejaillit sur les relations juridiques entre le syndicat de copropriété et l’éventuel propriétaire de la loge ou le vendeur d’immeuble à construire.
Introduction. Les salariés qui exercent l’activité de concierge ou gardien d’immeubles à usage d’habitation sont soumis à deux séries de dispositions spécifiques, les unes législatives, les autres conventionnelles.
Les premières sont insérées dans le Code du travail aux articles L.7211-1 à L.7215-1.
Les secondes constituent la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles.
C’est ainsi qu’en application des dispositions de l’article L.7211-2 du Code du travail : « Est considérée comme concierge, employé d’immeubles, femme ou homme de ménage d’immeuble à usage d’habitation, toute personne salariée par le propriétaire ou par le principal locataire et qui, logeant dans l’immeuble au titre d’accessoire au contrat de travail, est chargée d’en assurer la garde, la surveillance et l’entretien ou une partie de ces fonctions ».
La convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles s’applique quant à elle sur l’ensemble du territoire métropolitain au personnel disposant ou non d’un logement de fonction, à l’exception du personnel relevant d’une autre convention collective.[1]
Les salariés dépendants de la convention collective sont, selon les termes de l’article 18, répartis en deux catégories.
Les salariés de catégorie A travaillent dans un cadre horaire et sont soumis comme tels à un régime de droit commun.
Quant aux salariés de catégorie B ceux-ci relèvent d’un cadre dérogatoire excluant toute référence à un horaire.
Les salariés des catégories A et B sont-ils en mesure de bénéficier d’un logement de fonction?
L’article 20 de la convention collective dans sa rédaction actuelle issue de l’avenant n°74 du 27 avril 2009 répond désormais à cette question autrefois controversée laissant cependant dans l’incertitude les solutions applicables aux contrats de travail antérieurs à son entrée en vigueur.
La cour de Cassation vient cependant d’apporter récemment une réponse qui risque de peser sur les éventuels litiges à venir, compte tenu de la rétroactivité attachée aux solutions jurisprudentielles.
Le logement de fonction du gardien-concierge est en effet l’objet de nombreux différends entre employeurs et salariés suscitant par conséquent un important contentieux ainsi que l’illustrent les décisions judiciaires rendues récemment.
Il sera examiné successivement la jurisprudence relative aux conflits portant sur les conditions et modalités d’attribution du logement de fonction (I) puis sur celle inhérente à la suppression de cet accessoire au contrat de travail (II).
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I – L’ATTRIBUTION DU LOGEMENT DE FONCTION
A/ LE LOGEMENT DE FONCTION ACCESSOIRE OBLIGATOIRE AU CONTRAT DE TRAVAIL
L’article 20 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeuble, dans sa rédaction antérieure à l’avenant n° 74 du 27 avril 2009, précisait que le contrat de travail pouvait prévoir l’attribution d’un logement de fonction.
La mise à disposition du logement pouvait donc paraître facultative pour les deux catégories de salariés.
En effet, aucune distinction n’était faite, par ce texte, entre les salariés des catégories A et B.
Cependant si le salarié de catégorie A qui est un employé soumis à des contraintes horaires de droit commun n’est généralement pas logé sur place, l’absence de tout logement consenti au gardien-concierge de catégorie B qui assure la garde et la surveillance de l’immeuble semblait en contradiction avec la fonction même de gardiennage.
C’est ainsi qu’il a été soutenu que les dispositions du Code de travail, lesquelles s’appliquent cumulativement avec celles de la convention collective, rendaient obligatoire la fourniture d’un logement de fonction au gardien-concierge de catégorie B.[2]
La question n’était cependant pas résolue en jurisprudence.
C’est, semble-t-il, la raison pour laquelle, à la suite de l’avenant n° 74 du 27 avril 2009 (arrêté d’extension du 24 décembre 2009), applicable depuis le 1er janvier 2010, l’article 20 de la convention collective prévoit désormais l’attribution obligatoire d’un logement de fonction au gardien-concierge de catégorie B.
Seul l’employé d’immeuble de catégorie A se voit éventuellement logé à titre facultatif.
Cependant, la Cour de cassation s’est récemment prononcée sur l’attribution obligatoire d’un logement de fonction d’un salarié de catégorie B dans le cadre d’un contrat de travail conclu et achevé antérieurement à l’entrée en vigueur de l’avenant précité.[3]
Aux termes de cet arrêt, la Cour de cassation décide que le gardien-concierge aurait dû bénéficier d’un logement de fonction
Cette décision s’appuie sur l’article L.7211-2 du Code du travail auquel renvoie l’article 18 de la Convention collective pour les seuls salariés de la catégorie B, qui prévoit le logement dans l’immeuble à titre d’accessoire au contrat de travail.
La Cour de Cassation a analysé ces dispositions en une obligation de fournir un logement de fonction au personnel de la catégorie B.
Bien que rendu dans une espèce antérieure à l’entrée en vigueur de l’avenant du 27 avril 2009 modifiant l’article 20 de la convention collective, cet arrêt n’est évidemment pas sans conséquence, ne serait-ce qu’au plan du droit social.
En effet, il en résulterait que l’attribution d’un logement de fonction aux salariés classés en catégorie B de par la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles, serait obligatoire quelle que soit la date d’effet du contrat de travail.
Dès lors, tous les salariés de catégorie B dont les contrats ont été conclus, voire ont été entièrement exécutés antérieurement à l’entrée en vigueur de l’article 20 de la convention collective, soit avant le 1er janvier 2010, pourraient désormais solliciter le remboursement des loyers éventuellement versés à tort pour se loger, sous déduction de l’avantage en nature évalué par l’article 23 de la convention précitée et ce, sous réserve que les actions ne soient pas prescrites.
De plus, l’obligation de loger le gardien emporte également des conséquences pécuniaires qu’il convient de déterminer s’agissant d’un avantage en nature.
En effet, compte tenu de la jurisprudence actuelle qui sera examinée, il est parfois difficile de savoir s’il s’agit ou non d’une rémunération.
B/ LA MISE A DISPOSITION DU LOGEMENT DE FONCTION CONSTITUE-T-ELLE UN SALAIRE OU AVANTAGE EN NATURE ?
L’article 23 de la convention collective prévoit que la mise à disposition d’un logement de fonction constitue un salaire ou avantage en nature évalué en fonction de la surface exclusivement réservée à l’habitation par rapport au prix au mètre carré défini en fonction de la catégorie de confort auquel le logement se rattache.
Compte tenu du calcul évalué par l’article 23 précité, il est indéniable que l’attribution du logement de fonction constitue pour les salariés classés en catégorie B un très net avantage par rapport au personnel de catégorie A qui ne serait pas logé par l’employeur, dans la mesure où l’évaluation du montant du salaire en nature est généralement beaucoup plus basse que le montant d’un loyer classique.
Pour autant, la jurisprudence va encore plus loin.
Ainsi, a-t-il été jugé que l’attribution d’un logement de fonction pourrait ne pas constituer une rémunération en nature, contrairement aux dispositions précitées de la convention collective.
Cette jurisprudence se fonde sur l’existence dans certains contrats de travail du gardien ou dans certains règlements de copropriété, d’une clause prévoyant la mise à disposition d’un logement de fonction à titre gratuit.
S’agissant des prévisions du contrat de travail, l’on pourrait en effet admettre que la clause étant plus favorable au salarié, celle-ci puisse primer les dispositions pourtant impératives de la convention collective.
En revanche, le règlement de copropriété constitue, en vertu d’une jurisprudence constante, un contrat entre les différents copropriétaires auquel le gardien est bien évidemment étranger.[4]
C’est donc très curieusement que par un arrêt du 27 mars 2001[5], la Cour de cassation a décidé que la gardienne d’un immeuble pouvait se prévaloir d’une clause du règlement de copropriété prévoyant que le concierge serait logé gratuitement dans les locaux établis à cet effet dans l’immeuble.
Contre toute attente et en contradiction avec les dispositions de l’article 1165 du Code civil sur l’effet relatif des conventions vis-à-vis des tiers, la Cour de cassation a décidé que cette clause du règlement de copropriété emportait engagement unilatéral des copropriétaires de loger gratuitement le concierge, lequel pouvait se prévaloir de cet engagement.
En l’espèce, la salariée avait ainsi pu obtenir de son employeur le remboursement de la part de sa rémunération correspondant à l’avantage en nature constitué par le logement.
Il ne semble pas que d’autres arrêts de la Cour de cassation aient été rendus depuis lors dans le même sens sur le logement de fonction mais rien n’indique que cette jurisprudence ait été à ce jour abandonnée.
Tout au contraire, dans une hypothèse différente, la Cour de cassation, réunie en assemblée plénière, a adopté exactement le même raisonnement en ce qui concerne l’application du règlement de copropriété dans les rapports entre syndicat et salarié.
Ainsi, aux termes d’un arrêt du 5 mars 2010, la Cour de cassation a-t-elle décidé que le gardien pouvait se prévaloir, pour contester son licenciement, du non-respect d’une clause du règlement de copropriété obligeant le syndicat des copropriétaires à soumettre préalablement la décision de congédiement à l’accord de l’assemblée générale.[6]
Outre que le gardien était un tiers vis-à-vis des dispositions du règlement de copropriété, la clause concernée était, au surplus, contraire à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 qui réserve au seul syndic la décision de congédier le personnel.
L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 étant d’ordre public, la clause dont a pu se prévaloir le gardien était donc en fait réputée non écrite, ce que le syndicat n’avait cependant pas soulevé.
En tout état de cause, le logement de fonction, fourni à titre gratuit ou non, doit présenter des caractéristiques minimales permettant sa destination à l’habitation.
À défaut d’être conforme aux normes, le local ne pourrait constituer le logement du gardien et ne pourrait donc être mis à sa disposition, ce qui ne manquerait pas d’avoir des conséquences sur le contrat de gardiennage lui-même.
C/ CARACTERISTIQUES MINIMALES DU LOGEMENT MIS A DISPOSITION
L’article 20 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles prévoit que le logement de fonction devra au moins être conforme aux normes relatives au logement décent.
Il s’agit cependant de normes minimales.
Aussi, des normes supérieures prévues par les dispositions du Code de la construction et de l’habitation peuvent-elles éventuellement s’imposer.
C’est ainsi que la cour d’appel de Chambéry a, dans le cadre d’une vente en l’état futur d’achèvement précisant que la résidence disposait d’un couple gardien possédant un logement sur place, décidé que le logement fourni finalement par le promoteur ne disposait pas d’une surface suffisante pour constituer le logement du couple gardien[7].
La cour d’appel condamne ainsi le promoteur à délivrer gratuitement à la copropriété un logement d’une superficie apte à héberger un couple gardien, soit d’une superficie au moins égale à 28 m2 sous hauteur minimum de 1,80 m et d’un volume d’au moins 66 m3 conformément aux dispositions de l’article R.111-2 du Code de la construction et de l’habitation.
La 3ème chambre civile de la Cour de cassation a statué dans un sens similaire[8] en accueillant la demande de réparation du syndicat des copropriétaires à l’encontre du promoteur du fait du défaut de délivrance conforme constitué par la superficie insuffisante du local destiné au logement du gardien.
Cet arrêt de cassation censure une décision de la cour d’appel de Paris au visa de l’article 1602 du Code civil selon lequel tout pacte obscur ou ambigu s’interprète contre le vendeur.
Il était reproché à l’arrêt d’appel d’avoir décidé, à tort, que la mention d’une loge dans le règlement de copropriété n’impliquait pas que celle-ci soit susceptible d’être habitée.
La mention d’une loge de gardien dans les documents contractuels était en effet équivoque car elle pouvait laisser croire aux futurs acquéreurs que l’immeuble serait surveillé par un concierge logé sur place et non par un employé d’immeuble n’habitant pas les lieux.
Or, il s’agit d’un élément d’autant plus déterminant dans l’acquisition que, comme il a été évoqué[9], il n’est désormais plus possible d’employer un gardien de catégorie B sans l’accessoire à son contrat de travail que constitue son logement de fonction.
Cependant, qu’en est-il en cas de suppression du logement précédemment mis à disposition ?
Semblable suppression ne peut qu’avoir une incidence sur la validité du contrat de travail lui-même si celui-ci est en cours.
L’absence de mise à disposition du logement de fonction alimente en effet à ce titre un contentieux abondant.
II – SUPPRESSION DU LOGEMENT DE FONCTION
La suppression du logement de fonction au cours du contrat de travail pose évidemment des difficultés notamment lorsque le propriétaire du local n’est pas l’employeur du gardien.
A/ LE LOGEMENT DE FONCTION PARTIE PRIVATIVE
Il arrive parfois que le logement de fonction du gardien constitue une partie privative louée par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble à un copropriétaire individuel.
En effet, certains promoteurs prévoient que la loge de concierge et le logement de fonction attenant constituent une partie privative.
Bien que le syndicat des copropriétaires puisse être lui-même propriétaire d’une partie privative, la plupart du temps le promoteur vend la loge à un tiers ou en reste lui-même propriétaire.
Pareils montages, bien que contestés par certains syndicats, ont été validés par la jurisprudence[10].
Dès lors que le syndicat des copropriétaires se trouve dans l’obligation d’instituer un gardien logé au regard des dispositions du règlement de copropriété, celui-ci se voit contraint de louer le logement auprès d’un tiers.
Il en résulte une instabilité pour le syndicat des copropriétaires comme pour le gardien puisque l’accessoire au contrat de travail risque d’être remis en cause.
En effet, un congé peut être délivré par le propriétaire du logement de fonction, lequel n’est pas l’employeur du gardien.
Dans ces circonstances, la jurisprudence décide que la suppression de l’important avantage en nature que représente la mise à disposition d’un logement de fonction constitue une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser, sans que ce refus puisse constituer un motif réel et sérieux de licenciement.[11]
Cette jurisprudence est parfaitement logique.
En effet, la suppression du logement de fonction pour le gardien de catégorie B, alors même que le logement constitue un accessoire obligatoire au contrat de travail, est évidemment une modification substantielle du contrat, d’autant qu’il constitue en outre un avantage en nature et donc un élément de sa rémunération.
Aux termes d’un arrêt du 10 avril 2009[12], la cour d’appel de Paris a décidé que le copropriétaire acquéreur d’un lot de copropriété constituant le logement de fonction de la gardienne accessoire à son contrat de travail, avait en toute connaissance de cause accepté une limitation de son droit de propriété en conférant à des tiers, en l’occurrence le syndicat des copropriétaires et son employé, le droit d’usage de son bien.
C’est ainsi que la cour d’appel a refusé de valider le congé notifié par le copropriétaire au syndicat, au motif qu’il porterait atteinte au droit personnel d’occupation de la gardienne.
Cet arrêt a été particulièrement critiqué[13] et ce, à juste titre, puisqu’il entre en contradiction avec une jurisprudence constante.
En effet, dans un arrêt de principe du 4 janvier 1989, la troisième chambre civile avait censuré l’arrêt d’appel qui décidait que la loge du concierge érigée en un lot privatif lors de la division de l’immeuble, ne pouvait demeurer obligatoirement affectée au logement du gardien.[14]
Selon la Cour de cassation, une telle restriction au droit d’un copropriétaire sur son lot serait contraire aux dispositions de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965 aux termes duquel chaque copropriétaire dispose librement de ses parties privatives.
C’était également le sens d’un arrêt de la troisième chambre civile du 4 novembre 2004 décidant que les stipulations du règlement de copropriété selon lesquelles le concierge habiterait obligatoirement au rez-de-chaussée dans les locaux spécialement affectés à cet effet, ne pourraient instituer une restriction aux droits des copropriétaires sur leur lot.[15]
Par un arrêt du 13 janvier 2006, la cour d’appel d’Aix-en-Provence statuait dans le même sens en décidant que les mentions du règlement de copropriété faisant obligation à un copropriétaire de louer son appartement au syndicat des copropriétaires pour l’affecter au logement d’un concierge, devaient être réputées non écrites.[16]
Ces décisions illustrent bien la contradiction existant entre la libre disposition d’une partie privative et l’obligation de mise à disposition d’un logement de fonction.
Il est vrai que les montages mis en place par les promoteurs sont parfois déroutants.
Il en était ainsi d’un contrat de vente d’un lot dépendant d’un immeuble en copropriété contenant une clause selon laquelle le lot correspondait à la loge du concierge et serait ainsi occupé à titre gratuit.
Les nouveaux acquéreurs ont sollicité immédiatement du syndicat des copropriétaires une indemnité d’occupation tout en offrant la conclusion d’un bail.
L’assemblée générale des copropriétaires a refusé l’un et l’autre et souhaitait en réalité acquérir le lot, alors que le propriétaire n’entendait pas vendre.
La cour d’appel de Paris saisie du litige a considéré que le syndicat des copropriétaires aurait bénéficié d’un commodat ou prêt à usage sur le lot litigieux pour une durée indéterminée auquel le prêteur, à savoir l’acquéreur du lot, pouvait mettre fin à tout moment.[17]
Le syndicat des copropriétaires est dès lors expulsé des locaux qu’il occupe indûment à la suite de la résiliation du prêt à usage prononcée par la cour.
En conséquence, le gardien-concierge doit libérer les lieux ce qui, bien évidemment, entraîne des conséquences pour le syndicat des copropriétaires ainsi qu’il a été précédemment évoqué.
Il en est de même lorsque la libération du logement est consécutive à la rupture du contrat de travail.
B/ LIBERATION DU LOGEMENT DE FONCTION
L’article L.7212-1 du Code du travail prévoit que le salarié dont le contrat de travail est rompu à l’initiative de l’employeur ne peut être obligé à quitter son logement avant un délai minimum de préavis de trois mois.
Le non-respect par l’employeur de ce délai de préavis entraînerait le versement d’une indemnité compensatrice égale au prix de la location trimestrielle d’un logement équivalent à celui que le salarié occupe et des avantages en nature qu’il perçoit.
En cas de rupture du contrat de travail du fait du salarié, la libération du logement de fonction doit, en application de l’article 14 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles, s’effectuer au plus tard à l’expiration de la période de préavis.
En cas de défaut de libération du logement à bonne date, dans l’un et l’autre cas, le salarié est considéré par l’employeur comme étant devenu sans droit ni titre et le juge des référés du Tribunal d’Instance peut être saisi par l’employeur d’une demande d’expulsion.
Il s’agit d’une jurisprudence ancienne et bien établie.[18]
La compétence de la juridiction prud’homale est cependant souvent invoquée, à tort, puisqu’il ne s’agit plus d’un différend relatif au contrat de travail mais bien d’un litige relatif à des locaux à usage d’habitation relevant de la compétence du Tribunal d’Instance et, plus particulièrement, de la juridiction des référés laquelle est à même d’ordonner l’expulsion.[19]
CONCLUSION
L’obligation d’attribuer un logement de fonction au gardien de catégorie B résultant tant de l’évolution de la jurisprudence que de la modification de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles entraîne des conséquences parfois inattendues.
Ainsi, rejaillit-elle sur l’obligation de délivrance du vendeur d’immeuble à construire afin que le logement de fonction soit conforme aux normes de confort et d’habitabilité.
Cette nécessité de loger le concierge dans l’immeuble dont il assure la garde et la surveillance peut aussi se heurter au droit du copropriétaire de disposer librement des parties privatives afférentes à son lot lorsque la loge constitue une partie privative.
Dans tous les cas d’absence de mise à disposition ou de suppression du logement de fonction, le gardien de catégorie B pourra saisir la juridiction prud’homale pour solliciter un dédommagement dont l’employeur sera redevable.
En tout état de cause, il convient de se méfier des clauses des règlements de copropriété prévoyant la mise à disposition, à titre gratuit d’un logement de fonction.
En effet, l’application par la Cour de cassation de sa jurisprudence conduisant à exclure, dans ce cas, la contrepartie constituée par l’avantage en nature, permet à un employé de catégorie B de solliciter la mise à disposition gracieuse du logement de fonction prévu par le règlement de copropriété.
De surcroît, si cette jurisprudence, qui fait application des dispositions du règlement de copropriété aux rapports entre le syndicat et le salarié devait persister, celle-ci pourrait même conduire un employé de catégorie A à exiger la mise à disposition du logement de fonction pour peu que celui-ci soit visé au règlement de copropriété, alors que tant la convention collective que les dispositions légales applicables ne prévoient aucune obligation à cet égard.
Laurence GUEGAN
Avocat à la Cour d’Appel de PARIS
Spécialiste en Droit Immobilier